jeudi 23 juin 2016

8 heures

8h j'm'lève et j'regard' le soleil.
Pas besoin d'un réveil.
J'm fais un bon café
et pis je me laiss' aller

à voyager derrière mes carreaux.
Et j'vais loin dès l'matin
avec ma tartin' de pain
et mes rêves à gogo.

Je verrai bien l'orient
ou bien encor l'occident
si seul'ment j'avais l'temps
de fair l'tour de mon appartement.

Mais voilà je suis bien trop pris
avec mon agenda d'folie.
Midi j'reste encor au lit :
ça s'remue trop dans c'pays.

Alors je me laisse aller
et je r 'garde le soleil
jusqu'à m'aveugler.
Après c'est plus pareil,

le soir s'amèn sur l'bout des pieds
sans que j'le vois se pointer.
Trop tard pour s'affoler,
la nuit va tout régler,

Mes factur et pis mon loyer.
Pas la peine d'larmoyer,
d'main j'me mets au turbin
dès 8h le matin.

Demain c'est déjà aujourd'hui,
pas vu filer son matin,
la faut' à l'alcool de la nuit,
je sais c'est pas malin.

Si j'ouv' mes yeux enfin,
dehors c'est plus l'mêm' refrain.
Y a la crise toute grise
et sa bande qui défrise.

Ell's zon' tout l'trottoir
où les hom' circul't en noir.
Stop, ne m'fais pas le coup d'l'espoir,
demain sera jamais le matin du grand soir.

Alors ? Alors ;
j'laisse filer mon corps
entr' Rsa et peur du dehors,
jusqu'à ce que la mort

fass' les comptes et règl' mon sort
d'un tranchant sans remord.
En attendant j'laisse la bride
sur le cou d'mes heur'

et j'fil' des nuits torrid'
ent' minuit et cinq heur'.
8h j'me lève j'regard' le soleil
jusqu'à l'ultim' sommeil.

mercredi 15 juin 2016

Maudit poète

Ferai mieux de fermer la fabrique à gamberge, finis les culs secs à la table d'un Rimbaud ou Verlaine, je bois et je trinque mais reste malvoyant, du maudit j'endosse la veste mais reste avec ou sans absinthe le poète myope mal-disant.

Ferai mieux d'aller à la pêche, troquer le mot contre une canne, taquiner le poisson quand le vers me boude, d'ailleurs douze pieds sur l'hameçon n'aguichent plus la truite, l'amateur des rives sauvages s'en va rimer ailleurs, trempe son fil dans d'autres cours qui n'ont plus cours, ces musées où des mots sont mis en momies, épinglés en ribambelles immobiles, mots grenouilles à disséquer en laboratoires de littératures chloro-déformants, dont le jeune apprenant ne retiendra que le cadavre écartelé et vidé de son sang.

Je veux de la chair qui bouge sous mes doigts, agite mes méninges, secoue l'encre de mon stylo, se bat et s'échappe quand je voudrais la maintenir dans mes cages, la montrer dans mon zoo. Je souris quand elle s'enfuit car sa vie est plus forte que ma phrase nécrophage.

La vie bordel s'absente de mon poème et c'est tant mieux car le chasseur de papillons garde l'espoir de la traquer encore, d'étudier son territoire, de lui voler quelques grâces avant qu'elle ne s'évanouisse à nouveau.

Je suis geôlier, je suis pêcheur, voyeur, montreur mais je ne suis pas un tueur.