lundi 21 septembre 2015

Paradis

Sourires aux dents blanches jusqu'à l'aveuglement, visages sans rides, visages que l'on aime d'emblée : un père et devant sa fille. Un bonheur s'invite. Le regard vers ce point que nul ne voit, en deçà du cadre, en deçà du présent.

Derrière eux, le blanc d'un rêve, le blanc du temps, blanc de l'oubli, blanc du non lieu.

Et l'on se dit j 'aimerais, j'aurais aimé, j'aurais pu aimer et l'on se prend à vagabonder dans ce blanc, à le remplir d'un décor fait d'arbres et d'oiseaux, d'un ciel éternellement bleu et pourquoi pas la mer et pourquoi pas des voix d'enfants, pourquoi pas une comptine comme un refrain juvénile : une souris verte qui courait dans l'herbe...une petite souris pour de grands sourires et l'ogre qui croque, croque surtout les enfants malheureux, voilà pourquoi dans les photos ils sont toujours gracieux. Et l’œil derrière l'appareil à photo, l'œil qui cadre se plisse et qui rit ? L’œil d'une femme, l’œil d'une mère, l’œil aimant, l’œil aimé, celui qu'ils regardent de leur yeux photographiés, lointains, de plus en plus lointains fatigués de s'exposer année après année.

Paradis, paradis d'or que l'on adore sur son papier usé, à demi effacé. Ce paradis ne parade plus, de l'or il ne lui reste que l'âge, un or que l'on n'envie que s'il demeure sans, car tous nos paradis sont paradis perdus.