vendredi 28 novembre 2014

VIEUX

Gamberger dos tourné aux ruelles. Envier leur soleil. Errer sur des rives d'asphalte, quémander au seuil de leurs vitrines un peu de tendresse, admirer le bonheur des autres et baisser la tête.

Mes larmes, tu sais. L'aigreur qui remonte sur la langue, l'aigreur avant la colère, la colère avant l'impuissance. Serrer les lèvres, les lèvres et les poings, retenir son cri, se retenir : « et moi alors, et moi ! ». Un regard messieurs mesdames, un regard une main, un sourire, pourquoi pas un sourire pourquoi pas. Me sentir opaque une fois au moins. Mais y en a pas. Pas pour moi, pas . Pas dans ma gamelle,messieurs et mesdames.

Qu'est ce que ça coûterait, un gramme de chaleur pour me faire rêver que j'habite dans le même monde que toi, le monde avec toi mais pas contre. Qu'est ce que ça coûterait de parler d'homme à homme, simplement messieurs dames, comme « il fait beau, ça va, au revoir, bonjour », comme  « merci ».

Le matin s'éveiller et banalement sauter de son lit. Sauter, déjà sauter et puis marcher, déjà marcher, à la vitesse du pas des autres, ne pas être englouti par l'effort à faire.

Préparer son café, déjà lever son bras, sans en payer le châtiment. En sentir l'arôme, déjà en sentir l'arôme. Ça voudrait dire je l'ai fait, et il est là dans ma tasse, déjà la tasse à porter aux lèvres , ça voudrait dire sans la renverser, déjà commander à ma main, serrer les doigts, porter jusqu'aux lèvres, sans trop trembler, déjà ne pas trembler.

Allumer sa radio, entendre déjà entendre, suffisamment entendre les voix d'à coté, la vie des autres là, à cœur battant, déjà la vie de mes proches à cœur battant.

Exister, déjà exister sans mendier son écot d'humanité.
Être humblement un homme. 













Texte, © Joël Carayon 

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